: février 2006 |
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A Brigitta, qui permet de découvrir la production suisse et à tous les amoureux comme elle de l'art populaire, et à Eléonore qui nous permet la compréhension allemand-français via l'anglais...
Circonstance de découverte: C'est une lectrice de ce site qui a communiqué les photos du sifflet de ce mois ainsi que les informations à son sujet. Le mois de février et les jeux olympiques qui se déroulent au même moment imposaient de choisir ce sifflet qui nous vient des Alpes suisses. C'est aussi l'occasion de remercier les lecteurs du site pour les informations qu'ils apportent. Si ils ne reçoivent pas de réponse, qu'ils n'hésitent pas à renvoyer un mail. Il arrive que certaines adresses soient invalides quand je réponds (c'est le cas pour Teresa du Portugal et pour un lecteur polonais). Description générale:
Le sifflet du mois a une forme conique ouverte à la partie étroite. L'ouverture du sifflet se situe dans la base. |
H max: 6cm D max: 5 cm Col. particulière |
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Tampon du potier inversé sur le sifflet.
et inversé pour la lecture. L. Merz Hafner Einsiedeln |
Einsielden: Einsielden est une commune du canton de Schwyz au coeur de la Suisse. En 835 Meinrad, un moine bénédictin de l'île de la Reichenau sur le lac de Constance, se retira dans la "Forêt sombre" pour y vivre comme ermite. D'autres ermites suivirent, parmi lesquels l'évêque Bennon de Metz en Lorraine. En 934, Eberhard, de noble origine, prêtre et chanoine de la cathédrale de Strasbourg, rassembla les ermites en communauté bénédictine. C'est l'origine du célèbre monastère d'Einsiedeln où se déroulent encore de nombreux pélérinages. Dans les études sur l'art et les traditions populaires suisses, cette commune est bien connue pour ses masques lors des défilés du carnaval. .
| © David Simonetti |
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Le monastère d'Einsiedeln.
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Etude de l'objet: La typologie: Ce sifflet est un sifflet globulaire à un trou de jeu permettant de produire une tierce mineure. Ces sifflets sont classés dans la catègorie A1 par Mme Nixdorf. Il est tourné comme un petit vase et le bas de la paroi est coupé en biais. L'embouchure est formée par une fente dans la base qui s'ouvre face à ce biais
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Analyse:
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Ces sifflets sont appelés localement des "pfingstgugger" qu'on peut traduire par 'coucou de la Pentecôte'. La première mention écrite de ces sifflets se trouve sans doute dans un poème de Meinard Lienert de 1917: "D'Waldlüt vo Einsiedle" sur les habitants d'Einsiedeln. Il utilise dans le quatrième vers le terme de 'Pfingstetökelgschirrli' qui désigne sans doute les Pfingstgugger et les Pfingstscheller, c'est à dire les clochettes et sifflets de terre cuite de la Pentecôte décrits en 1935 par Martin Gyr dans son livre sur les coutumes populaires de Einsiedler: "Einsiedler Volksbräuche". C'est pendant une fête de la jeunesse en 1926 que sont remis à l'honneur ces jouets produits avant dans les anciens petits ateliers des potiers d'Einsiedeln. A cette époque, le potier Lorenz Merz-Kälin en produisait comme le montre ses 'Totenbildchen' (faire-part de décès avec une photo du défunt de son vivant remis aux personnes assistant aux funérailles) de janvier 1946 où on voit une étagère de cloches et de sifflets. On peut lire "Sini tönigä Guggärä und Pfingstschällä sind jetz verklungä. (Ses coucous et cloches d'argile de la Pentecôte deviennent silencieusesLe sifflet du mois a donc été tourné entre 1926 et 1946. Martin Gyr nous apprend aussi que ces sifflets étaient vendus à la Pentecôte. Les potiers fabriquaient pour cette occasion de la vaisselle miniature ainsi que les cloches et coucous (non glaçurés à la différence des dinettes). Le matin de la Pentecôte, ils dressaient leurs étalage devant l'hotel de ville et vendaient pour un "batzen" (ancienne monnaie) ces objets aux enfants. Dès midi, le village résonait du bruit des clochettes et des coucous, messagers du printemps. Comme on le voit, la vente des coucous s'inscrit parfaitement dans le cadre des jours des sifflets connus dans toute l'Europe. | |||||||||
Coucous tchèques Musée de Klatovy. Dessin Folk-toys, Les jouets populaires Emanuel Hercík 1949 |
Les sifflets de cette forme sont fabriqués dans tout le centre de l'Europe de la Hongrie à l'Alsace. En Hongrie, ces "kakukkolô" étaient encore vendus lors des fêtes patronales jusqu'aux années 1960,70.
Coucou hongrois
de György Mezö 1979. Szeged. Hongrie du Sud in Osteurpaïsche Tongefässflöten. Peter Király |
Coucou ou 'reclin'. Lizine avant 1890 Jura français. Col. Musée Comtois Besançon Coucou. Alsace Col. particulière
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Barrolets XIXe S. Musée Alsacien Haguenau |
Origine de la forme: La forme de ces sifflets est toujours rapprochée de celle du barrolet, petit récipient utilisé par le potier pour tracer le décor à l'engobe (mélange d'argile liquide). En allemand, cet objet s'appelle "malhörnchen": petite corne pour peindre. Dans d'autres régions, les potiers utilisent des cornes percées pour ces décors. Les modèles de sifflets les plus anciens ont une forme plus étirée qui se rapproche plus de la corne d'origine. Cette forme est juste la transposition par le potier des sifflets classiques en corne. Un sifflet de cette forme daté de 500-400 av J.-C. a été trouvé près de Poznan en Pologne et atteste l'ancienneté de ces modèles en Europe.
Sifflet découvert à Komorovo (PL)
500-400 av J.-C. |
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Le coucou aujourd'hui:
Heureusement, le coucou d'Einsiedeln résonne encore aujourd'hui. |
Production actuelle W. Auf der Maur Col. particulière |