Ce sifflet a malheureusement été trouvé hors contexte et son origine ne permet pas d'en déduire la région d'origine ou la zone de diffusion du centre de production. C'est aujourd'hui le cas le plus fréquent avec des objets qui circulent énormement entre les marchands et proviennent de familles ayant souvent quittées leur région d'origine.

Description générale:

Ce sifflet est en forme de buste d'homme. L'homme possède un bouc et une moustache soignés rappelant la mode de la Belle Epoque (1890-1914).

Il porte un chapeau conique dans le haut du quel s'ouvre le sifflet et le buste montre l'ébauche du haut d'une veste à col mousquetaire.

Le sifflet est en grès. Un éclat au bord du chapeau et un éclat au socle permettent de constater qu'il s'agit d'une terre grise.

Le décor:

Le sifflet est finement modelé. Barbe et chevelure sont évoquées par des traits fins. Un décor réalisé à la molette entoure le chapeau.

Un émail caramel au laitier couvre le sifflet en dehors de la base et du tour du sifflet.

La typologie: Il s'agit d'un sifflet globulaire sur socle de type a4 de Nixdorff.

Analyse:

La forme du sifflet est peu courante. Les potiers allemands ont produits à la fin du XIXème et au début du XXème siècles de nombreux petits sifflets moulés en forme de figurine où le sifflet s'ouvre souvent dans la tête comme pour le sifflet du mois.

Cependant, les grès allemands n'utilisent pas l'émail au laitier mais l'émaillage au sel ou un émail bleu parfois rehaussé de violet de manganèse.

Les sifflets en grès en France viennent le plus souvent du Berry ou de Puisaye.

Une autre série de sifflet en grès se rencontre également. Il s'agit de petites figurines sans embouchure apparente où le sifflet est simplement percé dans une partie de l'objet. Ils sont attribués à Malicorne dans la Sarthe mais cette origine est incertaine.
Il est aussi possible que ces sifflets aient été réalisés à la poterie Drouard de Cérans-Fouilletourte (Sarthe). Victor Chauveau, potier dans cette fabrique jusqu'en 1911 avant d'aller brièvement à Malicorne, a fabriqué ensuite à sa retraite des petits jouets ainsi que des pièces de forme.
Il est difficile d'être affirmatif en l'absence de pièce signée ou de catalogue. Tous les sifflets connus de cette série ont une glaçure au sel et la technique d'ouverture du sifflet directement par une fente dans la figurine est éloignée du sifflet du mois.

Les formes des sifflets de Puisaye sont classiques: oiseaux, coucous... Les pièces antropomorphes sont rares et inconnues pour les sifflets. Le Berry et ses nombreux sifflets aux formes variées est la région la plus probable de production en France pour le sifflet du mois.

Un sifflet conservé au musée du Berry de Bourges lève l'incertitude. Très proche du sifflet du mois, il s'agit d'une tête de femme où le sifflet d'ouvre dans la coiffure.

Ce sifflet est attribué à Marie-Louise Talbot (1846-1923). Marie-Louise Talbot est de la célèbre lignée de potiers. Son grand-père est le frère de Jean-Sébastien Talbot, le plus célèbre des potiers de La Borne et son père, Talbot-Milhet a produit beaucoup de pièces anthropomorphes.
Ses productions, bénitiers, figurines, plaques décoratives... montrent une grande dextérité mais souffrent malheureusement souvent d'une couverte au minium trop lourde comme le sifflet en forme de tête de femme en témoigne.
Un pot à tabac en forme de tête d'homme à barbiche et longue moustache dont le chapeau rond forme le couvercle est daté 1874 ce qui est probablement la période de fabrication du sifflet du mois.

Au XIXeme siècle, la pilosité devient le symbole du mâle dominant. Pour les domestiques, gens de maison, cochers, garçons de café et autres ouvriers, toute pilosité faciale est interdite. Le visage glabre signe l’état de dominé. Notre sifflet représente sans soute un notable.

Le personnage barbu rappelle les personnages ornant un bas relief figurant les différentes positions sociales attribué à Marie Louise Talbot. On y retrouve l'habileté qui caractérise cette potière et le naturalisme de ses portraits.
Les deux sifflets représentaient-ils un couple? Etait-ce un cadeau pour une noce ou pour des clients?
Il s'agit là sans nul doute de petits portraits qui nous replongent dans le Berry de la fin du XIXème siècle.